Journal de bord de l'Harmattan |
Mon, 09 Aug 2010 06:00:00 - 168°50W 19°15S N° 171 - Le papa et la maman de Harmattan
8H00 H en France, 19 heures J-1 heure du bord, Bonjour Ă tous, Pour les bateaux, ce n’est pas comme pour les petits d’homme, c’est souvent le papa qui porte l’enfant. Je vais vous raconter la genèse de l’Harmattan. Un journaliste, François Brignon de son nom d’écrivain, vivait dans un bateau de 9 mètres et rĂŞvait d’un bateau beaucoup plus grand oĂą il pourrait inviter un couple d’amis. Tous les mois il Ă©crivait un article pour « Les cahier du Yachting ». On est au dĂ©but des annĂ©es 1960. Un architecte naval, Vicktor Brix, Ă©migrant Russe venu en France avant les annĂ©es 1920 avait quelques très belles rĂ©alisations dans la navigation de plaisance. François Brignon me raconte avec sa voix chevrotante de vieux Monsieur : « Il a eu une histoire terrible, il a tuĂ© sa femme, Ă coups de hache je crois » En fait c’est sa mère qu’il a tuĂ© dans un moment de dĂ©mence et s’en suivi de très nombreuses annĂ©es d’internement. François Brignon continue : « Quand il est sorti de prison moi j’ai fait fi de tout cela parce que quand mĂŞme il dessinait de merveilleux bateaux » Et c’est ensemble qu’ils ont dessinĂ© ce magnifique objet. Tous les mois, dans les cahiers du Yachting, François relatait l’avancĂ© des travaux de son bateau, « L’homme tranquille », nommĂ© ainsi me dit il en souvenir d’un film oĂą joue John Wayne. D’ailleurs, je lance un appel, si quelqu’un possède encore des exemplaires de ces fameux cahiers, je suis très intĂ©ressĂ©. Un industriel vivant Ă Abidjan en CĂ´te d’Ivoire, très certainement abonnĂ© aux cahiers du Yachting, dĂ©cide alors de se construire Ă©galement ce magnifique bateau. Il se procure les plans et entreprends lĂ bas la construction de Harmattan. Je laisse la parole Ă son beau frère, Jean Louis Hugues : « Son constructeur (Yves Fortin) Ă©tait le conjoint de ma belle-sĹ“ur. « Je commence donc par vous conter ce que je sais d'Yves Fortin, de sa bouche mĂŞme: « Natif de Laon (Aisne), Yves s'Ă©tait expatriĂ© en CĂ´te d'Ivoire Ă l'âge de 17 ou 18 ans, avec « son CAP de plombier pour toute fortune (donc aux alentour de 1938 je pense) « EntrĂ©e comme contremaĂ®tre Ă la SAPC (Ste Anonyme de Plomberie de CĂ´te D'Ivoire), il en « rachetait toutes les parts quelques annĂ©es plus tard, avec un gros emprunt bancaire qu'il « liquidait en 5 ans!... Devenu le plus gros entrepreneur dans son domaine, il rĂ©alisa les « plus gros chantiers d'AOF (UniversitĂ© de Dakar, Palais de la prĂ©sidence, etc.). « C'est vers 1962 qu'il rencontrait me belle-sĹ“ur Arlette Vidal, rĂ©fugiĂ©e du Vietnam à « Abidjan. « Ils ne se marièrent pas, mais vĂ©curent "le grand amour" Ă Abidjan et en France, oĂą ses « affaires le menaient souvent. « Je l'ai donc connu Ă©pisodiquement Ă partir de 1962. « Je me flatte d'avoir probablement une petite part de responsabilitĂ© dans sa dĂ©cision de « construire un bateau: J'Ă©tais Ă cette Ă©poque officier Marine Marchande au Long Cours, et « c'est sur le paquebot Jean Mermoz, au cours d'un voyage Abidjan-Marseille que je fis la « connaissance de la famille Vidal (et surtout de Monique, sĹ“ur ainĂ©e d'Arlette, que j'ai « Ă©pousĂ©e en septembre 1964). Ayant toujours Ă©tĂ© un "Voileux", nous avons eu, Yves, « Arlette, Monique et moi, de longues rĂŞveries sur les croisières Ă la voile. « Ŕ la fin des annĂ©es 60, Yves et Arlette avaient pris la dĂ©cision de faire le tour du monde « Ă la voile dans quelques annĂ©es, et Yves mit son bateau en chantier, sur un terrain au « bord de la lagune d'Abidjan. Il le construisit lui-mĂŞme, avec plusieurs de ses ouvriers. « Comme vous le supposez sur votre site, il a effectivement Ă©tĂ© construit avec un moule, à « l'envers, puis retournĂ©. Je me souviens très bien de la rĂ©flexion d'Yves, qui, une fois la « coque achevĂ©e et Ă l'endroit, pensait que dans un an tout serait terminĂ©... Dure « confrontation Ă la rĂ©alitĂ© de la construction des amĂ©nagements, tout en bois massif, puis « de la recherche et des installations des accastillages Goyot. « Quand vint enfin le temps de le baptiser, c'est tout naturellement qu'il lui donna le nom « du vent qui souffle souvent sur la lagune d'Abidjan..... « Après quelques sorties dans la lagune et en Atlantique, Yves dĂ©cida de faire transporter « l'Harmattan sur un cargo, jusqu'Ă Marseille, en 1971. « En 1964, je m'Ă©tais reconverti dans l'informatique, et je rĂ©sidais Ă Lyon. Après l'a « rĂ©ception de l'Harmattan, et son remâtage au bassin de carĂ©nage du vieux Port, nous « fĂ®mes une petite croisière de Marseille Ă Nice, pour finalement louer une place Ă la « Grande Motte qui venait Ă peine d'ouvrir. Yves devant retourner en Afrique pour ses « affaires, il me confia l'Harmattan. « Dans les annĂ©es qui suivirent, je descendais donc rĂ©gulièrement de Lyon (3 heures de « trajet), pour des sorties de fins de semaines, et quelques croisières d'une ou deux « semaines, toujours en mĂ©diterranĂ©e. « Au cours de l'une de ces croisières oĂą j'avais quelques croisiĂ©ristes payants et « inexpĂ©rimentĂ©s, un fort coup de Mistral et une panne moteur nous obligea Ă nous « rĂ©fugier Ă Puerto-Soler (cĂ´te ouest de Majorque). Mes passagers, avaient eu la plus « grande peur de leur vie, et dĂ©cidèrent de rentrer en France par le prochain Paquebot... « Après rĂ©paration du Perkins, je me retrouvais seul, avec un beau bateau, mais pas « Ă©quipĂ© pour la navigation en solitaire. Je dĂ©cidais donc, la mort dans l'âme, et après « entente avec Yves, de laisser l'Harmattan Ă Soler, oĂą il viendrait lui mĂŞme le rĂ©cupĂ©rer « dans quelques mois. « HĂ©las, Arlette pĂ©rit soudainement dans l'incendie d'une boite de nuit d'Abidjan, avec une « soixantaine d'autres personnes. « En quelques mois, Yves vendit toutes ses entreprises, en Afrique et en France, et coupa « tous les liens. « Je n'ai plus jamais eu de ses nouvelles. Je ne mĂŞme sais pas s'il est venu chercher son « bateau. « Quelques annĂ©es plus tard, une rumeur disait qu'il avait trouvĂ© la mort en AmĂ©rique du « sud, mais je n'ai jamais pu en avoir confirmation. « Triste fin pour une belle vie, une grande rĂ©ussite et un grand rĂŞve... « Depuis, j'ai souvent fait des recherches pour essayer de savoir ce qu'Ă©tait devenu « l'Harmattan. Chaque fois que je visitais une marina, au Canada, en France ou aux « Antilles, je cherchais Ă retrouver sa splendide silhouette de bateau capable d'affronter la « vraie Mer, celle dont parle B. Moitessier dans sa Longue Route. « Aussi, quelle ne fut pas mon Ă©motion quand je reçu vendredi une lettre de mon frère « Philippe (de France) avec les pages de la revue FNAIR de mars 2010 parlant de vous. « Ayant lui-mĂŞme, avec son Ă©pouse Monika, eu l'occasion de faire une sortie en Mer sur « l'Harmattan, il a immĂ©diatement pensĂ© que je serai bien heureux de savoir que « L'Harmattan Ă©tait enfin en train de rĂ©aliser ce pourquoi il a Ă©tĂ© construit. « Je vous envie d'avoir pu le racheter, de l'avoir remis en Ă©tat et Ă©quipĂ© pour la navigation « en solitaire... « Jean-Louis Hugues, 67 ans, ex-officier Marine Marchande, RĂ©sident Ă Laval (QuĂ©bec –« Canada) HĂ© oui, Harmattan est enfin Ă sa place, au milieu des ocĂ©ans, en train de faire le tour du monde, ce pour quoi il a Ă©tĂ© rĂŞvĂ© avant d’être conçu. Certains objets ont une vĂ©ritable histoire de roman, Harmattan en fait parti. Quel bonheur pour pĂ©pĂ© Vieu, le prĂ©cĂ©dent propriĂ©taire de voir son bateau au milieu du Pacifique et quel hommage pour Yves et Arlette de continuer Ă faire naviguer ce bateau qu’ils ont si bien rĂ©ussi. Un bateau comme celui-ci, qui a une si belle histoire doit absolument ĂŞtre prĂ©servĂ©e. C’est un exemplaire unique, j’espère qu’après moi des passionnĂ©s auront Ă cĹ“ur de le maintenir en bon Ă©tat. Au niveau du quotidien, c’est la grande forme. Aujourd’hui, dimanche, c’était petits gĂ©siers de volaille et pommes de terre sautĂ©es dans la graisse des gĂ©siers. Ma petite touche personnelle c’est la pointe de vinaigre Ă la fin de la cuisson. Après cela la sieste Ă©tait la bien venue. La mer est plate, il fait beau, vent d’Est Sud Est entre 12 et 15 nĹ“uds. Nous nous trainons un peu entre 4,5 et 6 nĹ“uds. La vie est belle. Heureusement que j’avais prĂ©vue un ordinateur portable de secours car le mien a rendu l’â |
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