Journal de bord de l'Harmattan
Sun, 23 Oct 2011 15:00:00 - 53° 30’E 22° 55’S
N° 379 - Première nuit en mer

17H00 en France, 19H00 heure du bord

Bonjour Ă  tous,

Je n’ai pas très bien dormi cette nuit, j’ai eu du mal à trouver le sommeil et l’impression d’être en permanence éveillé. Lorsque je pars pour une longue traversée, il me faut entre 24 et 48 heures pour me mettre dans le rythme, pour trouver mes marques, pour me sentir bien dans ces conditions de vie si particulières.

Pourtant, la mer est aussi plate qu’un galet, il n’y a absolument pas de vent, j’ai la sensation d’être au port. Je peux poser un verre rempli sur la table extérieure sans que celui-ci, comme à son habitude, ne cherche à traverser le cockpit comme une fusée.

J’ai longtemps pensé que s’amariner consistait à s’habituer aux mouvements désordonnés du bateau, mais non, c’est beaucoup plus subtil que cela. En fait il faut arriver à rentrer dans cette nouvelle vie faite de précarité et de d’incertitude. Il faut accepter ce rythme si différent de la vie à terre. Je pense qu’inconsciemment, le stress est là et qu’il est nécessaire de s’en libérer. Cela ne peut se faire qu’avec un minimum de temps. Il faut arriver à s’identifier complètement au bateau, ne faire plus qu’un avec lui afin de retrouver la confiance absolue qui permet de se sentir en pleine sécurité, en parfaite osmose.

Cette nuit, je me suis levé plusieurs fois pour voir si le radar fonctionnait bien. Je remets totalement ma vie aux bons soins de sa technologie. Dans quelques jours, je dormirais 12 heures d’affilé sans plus me poser de questions.

Je serai alors pleinement heureux, j’aurai ce sentiment de plénitude que je viens chercher dans ces aventures. L’autonomie totale, la liberté absolue, le calme, la sérénité, la sensation d’être le maître du monde, en fait le maître de mon monde. Je sais qu’alors, il peut arriver n’importe quoi, je ferais face sans peur ni inquiétude. Quoi qu’il arrive, je gèrerais la situation en toute lucidité et avec le maximum d’efficacité.

Les longues traversées en solitaires sont une véritable drogue. Ces moments sont tellement bons, ce que l’on ressent est tellement intense que lorsqu’on y a gouté, on n’a plus qu’une idée, c’est de recommencer.

Pour limiter les risques de faire une infection urinaire pendant ma traversée, je bois 3 litres d’eau par jour. Résultat, comme mon rein fonctionne essentiellement la nuit, je me lève toutes les deux heures, ce qui ne facilite pas un sommeil profond.

Pour la première fois que je fréquente cet hémisphère, ce matin, un peu avant le levé du jour, j’ai pu admirer la croix du sud. Je suis content de l’avoir vu.

En début de matinée, je suis entouré d’un banc de thons. Ils sautent et les oiseaux de mer plongent en piqué. Pour une fois, j’ai envie de mettre la pêche à l’eau. J’ai à bord du matériel de pêche, essentiellement pour les amis, car je ne suis pas trop intéressé par la pêche. Quelle surprise, s’il y a beaucoup de pêcheurs, il n’y a pas de candidats pour entretenir le matériel. Le moulinet est dans un état pitoyable. Le fil est totalement tirebouchonné et je suis obligé de le retirer en totalité. Le moulinet lui-même n’a jamais été graissé et je pense qu’il n’a même jamais été rincé à l’eau claire. Il est inexploitable, des pièces sont grippées. Je passe ma matinée et une partie de l’après midi à le réviser. Démontage complet, séparation des pièces grippées, nettoyage, graissage avant de regarnir le moulinet d’une bonne longueur de nylon neuf.

Je suis sur une route maritime, dans la journée j’ai vu au moins cinq cargos dont un énorme porte-containers qui est passé à environ deux miles sur mon bâbord. Comme la météo est clémente, je vais essayer de serrer au plus près le plateau continental de Madagascar, c'est-à-dire à 80 miles au sud. Si cela se gâtait, il serait toujours temps de descendre plus sud.

Vers 15h30, il se met à pleuvoir et un vent de nord est se lève autour de 22 nœuds, me permettant de couper le moteur pour la première fois depuis le départ. Malheureusement cela ne dure pas, une heure plus tard, on se traine, le ciel est tout bleu, le soleil brille et le vent est totalement retombé. Je dois renvoyer le moteur principal.

Voilà une journée bien calme qui se termine, 110 miles sur les dernières 24 heures, 152 depuis le départ de la Réunion, une allure d’escargot.

A bientĂ´t.

Jean Louis


"cher jean-louis

Dommage pour la canne Ă 
pĂŞche....
Encore bravo avec Sylvie
je t'embrasse."


Envoyé par jeanine Barbier le 24-10-2011 à 21:04



"du thon avec une ratatouille c'est bon n'est ce pas ! bonne route bisous Cormeillois"

Envoyé par Marie Maryse le 24-10-2011 à 21:45

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