Journal de bord de l'Harmattan |
Fri, 23 Jan 2015 20:00:00 - 6° 04 N, 27° 08 W N° 762 - Une matinĂ©e Ă 6 degrĂ©s de latitude N
21h00 en France, 19h00 heure du bord.
Bonjour Ă tous,
J’aimerais partager et vous faire vire une matinée avec nous. Nous sommes à 6 degrés de latitude Nord, légèrement au dessus de la Zone de Convergence Intertropicale, sous les Tropiques comme l’on dit. Ici pas de véritables saisons, tout au long de l’année, les 24 heures de la journée se répartissent constamment en 12 heures de jour et 12 heures de nuit. Le soleil se lève à 6h30 et il se couche à 18h30.
Du coup, le soleil passant à peu de choses près au zénith tous les jours de l’année, il fait le même temps 365 jours pas an. Cependant un évènement peu modifier l’ordre des choses, c’est le déplacement ou l’augmentation de la largeur de la ZCI, la Zone de Convergence Intertropicale, le fameux pot au noir.
Au nord de celle-ci, soufflent force 4 à 5 des alizés de Nord Est et au Sud, les mêmes vents soufflent de Sud Est. Au milieu se situe une zone de conflit avec des vents faibles et des orages monstrueux. Cette zone évolue en largeur et en position au fil de l’année autour de l’Equateur.
Ce matin je me suis levé à 6h30, avec le soleil, un coup de brosse dans les cheveux avec mise en place du chouchou, j’ai enfilé un short puis j’ai musardé. Un tour à la table à carte bien sûr, un tour sur Internet pour lire les messages et voir la météo. D’ailleurs j’en profite pour vous remercier encore une fois pour ces messages sympas que vous m’envoyez, cela me touche énormément.
Puis c’est le tour d’horizon dans le cockpit. Je regarde la mer, il n’y a rien à voir, il faut juste regarder et se sentir vivre, quelle jouissance cet alizé sur la peau. Maintenant il fait entre 27 et 29 degrés jour et nuit, j’ai l’impression d’être un poisson dans l’eau. D’ailleurs il faut effectuer un tour du pont pour remettre à la mer les cadavres de ces pauvres poissons volants qui sont venus mourir là cette nuit.
Puis j’attrape « Complètement Cramé », je l’ai commencé hier. Depuis un an et demi je n’avais pas ouvert un livre. Je n’ai pas eu le temps. Quelle mauvaise excuse ! Non, j’ai tout simplement mis mes priorités autre part. Cette expression « je n’ai pas le temps » est souvent employée d’une façon inappropriée.
De la même façon, je suis toujours choqué lorsque certaines personnes lancent péremptoirement des jugements de valeur : C’est moche, c’est pas bon… Certains sont prêts à mordre si l’on n’est pas de leur avis. Pourquoi vouloir juger une fois pour toute et être persuadé qu’il n’y a que leur vérité. On pourrait dire par exemple : je n’aime pas trop, ce n’est pas mon goût…
Mais revenons à nos moutons, qui courent dans la mer ce matin d’ailleurs. Le ciel est dégagé, le soleil brille, l’alizé souffle à 20 Nœuds, il est 8 heures et demi et surtout, le reste de gâteau d’anniversaire ne cesse de me faire de l’œil. Je ne vais pas pouvoir résister plus longtemps sans lui sauter dessus. Vite, il faut faire quelque chose.
Je mets de l’eau à bouillir pour le café et sélectionne « le » morceau mythique par excellence, l’indémodable, le sublime, le transgénérationnel, l’inoubliable, vous l’avez tous reconnu, sur l’album des Eagles, Hôtel California. J’envoie sur les quatre hauts parleurs du bord, niveau médium et ne tarde pas à voir surgir par la descente arrière une tête ébouriffée mais souriante.
Le petit déjeuner pris dans le cockpit est un moment sympa, il fait bon, on regarde la mer en discutant, on traîne, rien ne nous presse. Depuis Las Palmas nous n’avons pas vu le moindre bateau, nous sommes seuls au monde, aux antipodes des pauvres malheureux entassés dans les métros parisiens.
La mer est moins prolifique ce matin, hier elle était recouverte de grandes prairies marron claire. De ces prairies, sorte de lichen flottants, dépassent de plusieurs centimètres des poussent jaune clair. Cette exubérance est favorisé par la température, au Cap Vert la mer était à 21°, ici elle atteint 30°.
Nous sommes partis avec 230 litres d’eau dans la soute. Elle sert à nous laver, à faire la vaisselle et à faire les repas (eau pour cuire le riz, les pâtes, les pommes de terre …) Lorsqu’on sait qu’une américaine consomme 250 litres d’eau tous les jours de sa vie, pas besoin de dessin. Il faut é c o n o m i s e r. Quel gâchis ! Ici ce sont 2 à 3 litres chacun pour la toilette et environ 4 litres pour la vaisselle qui n’est faite qu’une fois par jour. C’est le boulot de Jacky.
Pour la première fois ce matin j’ai décidé d’allumer le déssalinisateur. Il produit environ 100 litres d’eau potable en quatre heures de fonctionnement. Ce soir je vais devoir laisser tourner le groupe un peu plus longtemps mais pour fêter cela une bonne douche (environ 5 litres d’eau) m’a fait le plus grand bien.
Harmattan continue à marcher très fort, encore 204 Miles aujourd’hui. Je pense que le lochspeedo surestime un peu la vitesse et donc les distances parcourues, mais tout de même, quel descente !
A bientĂ´t.
Jean-Louis |
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