Journal de bord de l'Harmattan |
Wed, 29 Jan 2015 20:00:00 - 2° 35 S, 30° 56 W N° 767 - Un petit matin d’étĂ©
21h00 en France, 19h00 heure du bord.
Bonjour Ă tous,
Qu’il est agréable ce petit matin d’été ! Des souvenirs affluent, je me revoie enfant, dans la coure de notre grande maison au bord de l’Yonne, en pleine campagne, avec un bruit de cascade et cette fraîche odeur d’eau brassée due au barrage régulant la rivière à cet endroit.
Tout est calme, les oiseaux chantent, il fait bon se promener dans le jardin où le tourniquet arrose les planches de plantation faisant remonter toutes ces bonnes odeurs de terre mouillée. Je goûte une framboise, il faut profiter de ces quelques heures tranquilles avant que l’ardeur du soleil ne nous contraigne à rester au frais à l’intérieur.
Hier soir le vent a faiblit en refusant, m’obligeant à démarrer le moteur au ralenti pour continuer à faire route. La grosse houle s’est peu à peu calmée et la nuit a été propice au repos. Je n’ai pas dormi, j’ai carrément comaté. J’ai même réussi à pisser dans le WC sans ouvrir le couvercle, je me suis réveillé lorsque j’ai senti des éclaboussures sur mes genoux. Ce matin le ciel est bleu, la mer est belle et le soleil commence à briller. Il va faire très chaud cet après-midi.
Je suis fasciné par l’oiseau de mer qui nous accompagne. Qu’il est beau ! Il plane autour du bateau, me dépasse en tournant franchement la tête pour me regarder droit dans les yeux. Sa forme est magnifique, ses lignes sont faites pour pénétrer l’air sans efforts. On dirait qu’il a été conçu dans une soufflerie.
Le dessous de son corps, sur l’avant est crème, non, plus exactement couleur café au lait très clair. Le dessus blanc sur l’avant puis de plus en plus tacheté de couleurs plus sombres, l’arrière et le bout des ailes est noir. Sa beauté est parfaite, la nature est une artiste. Comme souvent en mer, ce matin j’assiste à une partie de pêche.
L’oiseau vole juste devant le génois en planant gracieusement sur la droite et sur la gauche tout en observant la mer à l’avant du bateau. Lorsqu’un poisson volant s’enfuit, effrayé par l’étrave qui fend l’eau, l’oiseau replie ses ailes formant une sorte de W et tombe comme une pierre sur le malheureux.
Du coup, moi aussi j’ai envie de pêcher, je mets immédiatement la ligne en place car l’alternance d’œufs brouillés et de saucisses commence à devenir lassant. J’ai une recette de thon à la méditerranéenne qui pourrait faire fureur à bord.
Vers neuf heures le vent revient en adonnant, je coupe le moteur, modifie un peu le cap, renvoie du génois et nous filons maintenant entre 4,5 et 5 Nœuds, c’est le bonheur.
Il est 9h30, bziiiiiiii…. la ligne part. Jacky qui est dans le cockpit se retourne et un souvenir se grave dans sa mémoire à tout jamais, un énorme espadon avec sa lance et sa grand voile déployée est en train de faire un bond au dessus de l’eau à quelques mètres sur l’arrière d’Harmattan. Sur la lèvre inférieure il a un petit Rapala en pendentif. Dans ce saut magistral le leurre se décroche et seul restera ce souvenir dans la tête de Jacky. Heureusement car je n’ai pas de recette d’espadon.
« La première fois » « On n’y pense même pas » « On donne le meilleur de soi même »
Sur Radio Harmattan France Gall est l’invitée du jour, le saxo fait vibrer les cloisons, c’est beau à pleurer, quelle est belle cette vie ! J’adore le saxo. J’aimerai bien qu’à ma dernière fête quelqu’un joue du saxo. Un noir si possible et soyons fou pourquoi pas en queue de pie blanche.
Mais je ne suis pas pressé, tant que j’aurais encore un peu de forces, tant que j’aurais encore ma tête, je ferais tout pour continuer à vivre cette vie d’aventures qui me va si bien et qui m’apporte tant. C’est mon « Itinéraire d’un enfant gâté », j’adore ce film, je peux le regarder en boucle. Surtout la première partie d’ailleurs. C’est le seul Lelouch qui me touche réellement et sa façon de réaliser est tellement bien adaptée à l’ambiance de ce film. Rêver, rêver, toujours rêver, comme c’est bon !
Gâté ! Oui, gâté je le suis, je suis un enfant gâté. Grâce à ma passion de réussir, j’ai obtenu tout ce que j’ai voulu de la vie. J’aimerai tellement transmettre à mes petits enfants ce goût de réussir mais je dois me rendre à l’évidence, si au moins un seul d’entre eux attrape ce virus, le goût de l’effort, la pugnacité, la niaque, la détermination, la persévérance alors je serais totalement comblé.
Ce midi le soleil est brillant, la mer scintille de milles éclats. Nous sommes dans le cockpit, à l’ombre de la capote. Peut-on imaginer être mieux que sous les tropiques, à l’ombre, avec un courant d’air tiède qui nous caresse doucement ? France Gall chante « L’homme est un loup pour l’homme » mais comme il nous paraît loin ce monde de fous. Nous avons l’impression d’être seuls sur une autre planète.
99 Miles de plus au compteur journalier.
A bientĂ´t
Jean-Louis |
"cher jean-louis, oui, la sous-sta : bons et tristes moments. ici, il pleut, je sors peu, mais avec la télé, internet et autre : c'est la retraite quand même : bisous jeanine"
Envoyé par jeanine le 29-01-2015 à 15:31
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